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Plusieurs livres de la Bible filent la métaphore entre les épousailles humaines
et l’amour de Dieu, lesquelles s’opposent respectivement à la prostitution et à l’idolâtrie. Osée a introduit dans la bible la comparaison entre
l’amour conjugal et l’amour de Dieu. Or si l’on croit les
derniers travaux d’exégèse, Osée a vécu au moment où
s’est cristallisé la notion d’un Dieu unique dans le milieu
culturel qui a écrit la Bible.
On pourrait penser que l’expérience spirituelle d’Osée, faisant
le lien entre son amour malheureux pour Gomer et l’amour de Dieu
pour son peuple, a été fondamentale pour la maturation spirituelle
des milieux bibliques. En tout cas il y a simultanéité entre cette
expérience personnelle, qui a dû faire école puisqu’il a
certainement eu des disciples qui ont transmis et complété le livre
d’Osée dans le royaume de Juda, et le rejet du polythéisme
idolâtrique. L’importance donnée par Jésus au thème de l’amour
de Dieu, mais aussi à l’image de noces pour décrire le Royaume de
Dieu, montre clairement que parmi les traditions bibliques Jésus
s’inscrit particulièrement dans celle initiée par Osée. Quoique
tardivement, l’Eglise considère le mariage comme un sacrement. Le
Cantique des cantiques a été sans cesse médité, en particulier
dans le milieu monastique, réactualisant au cours de l’histoire de
l’Eglise la spiritualité d’une Eglise épouse de Dieu.
Essayons
de définir ici les notions centrales d’une théologie des
épousailles, puis je souhaiterais discuter de l’usage des
citations bibliques pour étayer une théologie, une morale ou une
idéologie.
Les
épousailles : fidélité et chasteté contre les
prostitutions.
Comme
déjà indiqué, plusieurs éléments d’exégèse laissent penser
que l’expérience concrète d’Osée, à la fois vivant
sincèrement l’expérience universelle de l’amour, mais aussi
confronté à la prostitution, la négation la plus totale de cet
amour, a eu lieu à l’époque de l’apparition de la foi biblique
en un dieu unique. Je propose que cet événement original a été
fondateur dans l’histoire de la révélation. C’est d’avoir
vécu ce bonheur d’être amoureux, puis d’être confronté à
l’anéantissement de ce à quoi il avait aspiré par la réalité
concrète de la prostitution de celle qu’il aimait qui a permit à
Osée de réaliser de quel amour douloureux Dieu aime l’humanité.
Il a pu faire le lien entre les récits des commencements qui
mettaient en scène une création amoureuse de l’humanité par
Dieu, avec la colère que l’on a prêté à Dieu à travers les
manifestations naturelles violentes ou à travers des événements
historiques injustes. Ce que je propose par « théologie des
épousailles », c’est de retourner à cette source
spirituelle. L’humanité ne cesse d’accueillir les amours heureux
de ses enfants, et dans le même temps l’humanité continue à être
en prise avec ses prostitutions. Méditer cette confrontation permet
non seulement, à l’instar d’Osée et de ses disciples, de découvrir
de quel amour Dieu nous aime, mais aussi cela nous invite à prendre
part aux tentatives de séduction de Dieu : dénoncer les
prostitutions de notre temps, s’y opposer, inviter l’humanité à
retourner au désert pour retrouver son origine, pour redécouvrir sa
vocation.
Tout mariage ne s’oppose pas automatiquement à la prostitution. Plusieurs formes de mariages
sont mêmes complices de la prostitution, en particulier quand ils ne
résistent pas à l’idolâtrie de l’argent, quand ils nient la
vocation même de l’humanité créée femme et homme d’être à
la ressemblance de Dieu dans une égale dignité et quand ils pêchent
contre leurs propres enfants en ne se fiant pas à eux. Je propose
d’appeler « épousailles » la dynamique des mariages
anti-prostitutionnels. Pour maintenir une continuité sémantique
avec le jeu de mot en hébreux biblique entre « ‘Ish »
et « Ishah », entre époux et épouse. Je préfère le
couple de mot « épouse et époux » à «mari et femme »,
car ce dernier par l’asymétrie qu’il porte laisse trop
facilement penser que l’un serait inférieur à l’autre. De plus
l’usage, quoique compréhensible en pratique, assigne mari et femme
au possessif. Le mot « épousailles » est aussi
toujours un pluriel, ce qui a l’avantage d’exclure l’idée
qu’il puisse y avoir un modèle unique de mariage. Sa définition
exacte dans le dictionnaire donne « célébration d’un
mariage, noces » .
Cela convient aussi plutôt bien, Jésus ne propose-t-il pas
plusieurs fois de comparer le Royaume avec des noces ? Les
célébrations liturgiques de l’Eglise ne peuvent-elles pas être
pensées en rapport avec une longue fête de noces qui inviterait
toute la famille humaine ?
Redonner sens aux mots.
Les
épousailles ne sont pas seulement une fête. Elles s’opposent à
ce qui nie et perverti l’amour : la prostitution. Dans cette
lutte spirituelle, deux vertus me semblent centrales, quoique
l’ennemi, la prostitution, les ait flétri dans l’entendement
commun que l’on a de leur signification : chasteté et
fidélité. Vite dit, la fidélité n’est pas la constance austère
et triste dans une relation exclusive avec son partenaire. La
fidélité prend tout son sens remis dans un champ sémantique qui
écoute l’étymologie. La fidélité a à voir avec « foi »,
« confiance » et le verbe « se fier à ». Ses
antonymes sont « méfiance » et « défiance ».
La fidélité, c’est avant tout une relation où règne la Foi, où
on se fie l’un à l’autre. On voit alors aisément que les
jalousies pour être sûr de l’exclusivité des relations sexuelles
de son partenaire sont plus contraires à la fidélité que le fait
d’être volage. La fidélité ne contrôle pas l’autre, elle
l’encourage. La fidélité se réjouit du bonheur de l’autre.
La
chasteté de son côté n’est pas synonyme de continence. Là aussi
l’étymologie permet de retourner au sens vivifiant du mot.
L’antonyme de « chasteté » est « inceste ».
Or ce qui est en cause dans l’inceste, ce n’est pas seulement d'enfreindre des tabous, c’est surtout le fait d'utiliser l’autre comme un
moyen pour satisfaire son désir, sans considération pour
l’autonomie, le désir propre et la dignité d’autrui. C’est
pourquoi certaines relations sexuelles sont forcément non-chastes,
parce que vu, les liens de parenté, assouvir une relation sexuelle
nierait automatiquement l’autre. Mais la question de l’autre se
pose dans toutes les relations, pas forcément quand il y a sexualité
active, et pas forcément quand il y a parenté. La chasteté d'est le
respect de l’autre dans son altérité. La question de la chasteté se pose donc dans toutes les relations à autrui. Elle se
pose de manière plus brûlante quand on s’engage à vivre une
relation forte avec quelqu’un en particulier, dans l’amitié,
mais évidemment aussi dans l’amour érotique.
C’est à ce titre
que tout couple chrétien est appelé à être chaste et fidèle. On
voit aisément comment la chasteté et la fidélité s’opposent à
la prostitution. La chasteté refuse tout rapport de domination entre
les époux. Elle promeut même la dignité de son partenaire. La
fidélité coupe l’herbe sous les pieds de l’argent-idôle. Se
fier à l’autre subverti en profondeur la dépendance que l’on
pourrait ressentir vis-à-vis des pouvoirs de l’argent. Enfin
fidélité et chasteté préservent les enfants des logiques de la
prostitution. Être chaste en famille, c’est aussi être chaste
vis-à-vis de ses enfants. Ce qui ne veut pas seulement dire
s’interdire d’avoir des relations sexuelles avec eux. Cela veut aussi dire ne jamais les instrumentaliser, ne jamais en faire des
prolongements de nos ambitions, ne jamais les soumettre aux diktats
de nos propres combats et obsessions. Avoir foi en ses enfants, c’est la seule manière
de leur apprendre à avoir foi en eux, en la vie, et en autrui y
compris dans le Tout Autre.
La
chasteté et la fidélité sont aussi des vertus pour notre rapport à
Dieu. Souvent
les membres de différentes religions, surtout des religions dites
monothéistes, se reconnaissent entre eux comme des « croyants ».
Je ne me reconnais de moins en moins dans cette désignation. Je
crois de moins en moins que l’acte de croire soit central dans nos
religions. Il me semble plutôt que « fidèles » désigne
plus justement, sinon ce que nous sommes, au moins ce que nous
visons. Encore faut-il se défaire de la perversion du sens du mot
« fidèle » qui laisse penser qu’il s’agirait de gens
obéissant servilement à une hiérarchie et à des préceptes
arbitraires. L’origine spirituelle commune de ces religions est la
lutte contre les idolâtries (shirk en Islam), qui ne sont pas forcément assimilables
au polythéisme au sens strict. Il me semble d’ailleurs qu’on
trouve dans des religions polythéistes des spiritualités
profondément anti-idolâtriques. Je pense notamment à un certain
nombre de poème de Rabindranath Tagore. Les athées et les
agnostiques peuvent même à ce titre être moins idolâtres que tous
les religieux, puisque, refusant toute représentation de Dieu, ils
sont assurés de ne jamais s’en faire de fausses représentations
asservissantes. Les chrétiens n’ont-ils pas du temps de leur
persécution sous l’empire romain été entre autre accusé
d’athéisme ? Une des hérésies que les pères de l’Eglise
ont combattue avec le plus d’énergie n’a-t-elle pas été la
Gnose ? Les athées et les agnostiques ne sont pourtant pas
préservé de se faire des fausses idoles, quand bien même ils ne
les nommeraient pas Dieu, mais « Nation », « Argent »,
« Idéologie », etc.
Cependant, la théologie des
épousailles, centrée sur la promotion de la foi phénoménologique,
pourrait proposer une nouvelle manière de penser le dialogue inter-religieux, au sens le plus large, incluant les athées et
agnostiques. La foi phénoménologique se rapporte à toute ces
occasions de se fier : se fier à ses parents, se fier à un.e
ami.e, se fier à son époux.se, se fier à une parole, dite ou
écrite, se fier à une institution (état, église, syndicat, parti,
entreprise, etc.), se fier à sa vocation, etc. Chacune de ces
occasions de foi fait face à un danger d’idolâtrie/prostitution,
à l’instar de la foi en Dieu ou de la foi d’un couple d’amant.
Sous toutes ces formes, la foi est hautement précaire, car elle ne
dépend pas seulement de sa propre capacité à se fier. Elle peut
être trahit par l’autre ou par les circonstances. Ne sommes-nous
pas désillusionnés, amers et parfois même cyniques vis-à-vis de
toutes ces occasions de foi ? Les parents peuvent avoir été
violents, ou tout simplement médiocres (ils le sont toujours à un
moment ou un autre !), un ami peut trahir ou décevoir, une
parole peut avoir été travestie (c’est d’ailleurs la première
étape de la chute de l’humanité en Genèse 2 : le serpent
travesti la parole de Dieu), on peut échouer à réaliser ce que
l’on croit porter profondément en soi… Il est en fin de compte
impossible de conserver une foi innocente. C’est le grand défi de
la foi : réussir à la susciter de nouveau malgré toutes les
désillusions. Nombre de traditions religieuses, spirituelles et
philosophiques relèvent ce défi. S’appuyer sur la base de la foi
phénoménologique constituerait une nouvelle manière de proposer un
dialogue à égalité et dans la réciprocité avec l’ensemble de
l’humanité. Un dialogue qui n’hésite pas à s’encourager dans
l’émulation spirituelle à lutter contre toutes formes d’idolâtrie
et de prostitution. Ce dialogue donnerait un réel soutien à nos
contemporains. En effet, aux marges de nos sociétés se développent
une nouvelle pathologie psychiatrique, l’autoexclusion, qui a pour
origine une grande difficulté à avoir foi en la vie.
Par
ailleurs les fanatismes et intégrismes sont des formes de religions
incestueuses. J’ai toujours été étonné de voir une similitude
psychologique forte entre les intégristes de toutes les religions
que j’ai pu rencontrer. Ils instrumentalisent Dieu et sa parole
pour résoudre leur conflit intérieur ou pour assouvir leur soif de
pouvoir. Ce faisant ils ne souffrent aucune contradiction, ils sont
incapables d’écouter l’autre, un point de vue différent, même
une nuance. Ils réagissent avec agressivité, et sont prêts à
toutes les violences. Il y a aussi un enjeu éthique dans la manière
avec laquelle on lit un texte. Violentons-nous le texte en lui
imposant une interprétation que l’on connaît avant de le lire, ou
bien nous mettons-nous à son écoute, prêt à nous laisser
surprendre et convertir ? C’est en ce sens que la méthode
exégétique est aussi un sujet de la théologie des épousailles.
La
prostitution de la parole de Dieu
Dans
le débat actuel sur le mariage pour tous, on lit souvent des
chrétiens fonder leur opposition à toutes unions homosexuelles sur
la base de citations bibliques, et d’en déduire une
« anthropologie biblique » qui interdirait
l’homosexualité. De mon côté, j’ai essayé de construire une
théologie des épousailles qui condamne la prostitution, en me
référant aussi à un certain nombre de citations. Sommes-nous
condamnés à développer des théologies parallèles en choisissant
ce qui nous convient dans la Bible ? Quelle herméneutique de la
Bible convient ? Mentionnons d’abord que la Bible est
traversée de contradictions. Elle est constituée d’un grand
nombre de livres, écrits à des époques et dans des contextes
différents. A travers ces différents livres, nous découvrons
plusieurs théologies différentes. Les livres ayant connu une
histoire rédactionnelle particulièrement compliquée peuvent avoir
plusieurs théologies entremêlées dans leur trame narrative. La
Bible ne présente pas seulement une diversité de théologies, mais
aussi différentes cosmologies et anthropologies. Ce qui me paraît
le plus critiquable chez les créationnistes, ce n’est pas la
faible scientificité de leur théorie de la Création, c’est la
faible rigueur exégétique avec laquelle ils lisent la Bible, alors
que la Genèse s’ouvre sur deux récits des commencements qui
présentent nombre de contradiction. A travers la Bible, on rencontre
par ailleurs des modèles du monde très variés, mais que l’on ne
pourrait pas rassembler dans un modèle unique. De même, la Bible
répond de manière variée à la question "qu’est ce que l’humain?".
Dans le premier récit des commencements, l’humain est crée après
les animaux terrestres, mais le même jour qu’eux. C’est là
qu’on trouve qu’il est crée à la ressemblance de Dieu. Comme si
l’humain était à mi-chemin entre l’animalité et le divin.
L’humain est créé dès le premier instant féminin et masculin.
Dans le second récit, l’humain est modelé à partir de la glaise.
Les animaux sont créés ensuite pour que l’humain ne soit pas
seul. L’humain nomme les animaux, participant à l’acte créateur
de Dieu. L’humain ne trouve cependant de compagnie appariée que
quand il est séparé entre féminin et masculin. A ce moment il se
nomme lui-même. Cela occuperait beaucoup de temps d’analyser les
différences et similitudes entre ces deux modèles, il n’en reste
pas moins que ce sont deux représentations différentes de l’origine
et de la nature de l’humanité. Vite résumé un premier modèle où l'humain est en continuité avec l'animalité et où la différence de genre est consubstantielle de l'humanité; et un second modèle où l'humain est issu de la terre et qui a connu un temps androgyne avant l'apparition de la différence de genre.
En
plus de la présence parallèle de points de vue différents sur
Dieu, l’humain, le monde, l’histoire ou la morale, la Bible est
traversée par des débats. La Bible dans son intertextualité peut
se questionner, s’interpeller, se contredire, se dénoncer et se
condamner. Nous en voyons un exemple dans le livre d’Osée. Osée
condamne le massacre de Yzréel commis par Jéhu (Os. 1,4-5). Pourtant l’auteur
du deuxième livre des Rois présente cet événement comme un acte
voulu par Dieu (2Roi9). Tout au plus est manifesté une réprobation en
annonçant que la dynastie de Jéhu aura une fin. Mais on se félicite
que Jéhu ait chassé et massacré les idolâtres. De même voyons comment Jésus répond au piège tendu par les pharisiens à
propos de la répudiation (Mt19,4-5). Jésus ne contredit pas directement la
loi. Il pose une hiérarchie des normes. La vocation de l’humanité
à la création prime sur la loi de Moïse. Cette dernière a été
une concession pragmatique pour éviter pire encore vu la dureté de
cœur des hommes. Mais Jésus n’avalise pas ce pragmatisme, qui au
fond relève d’un pessimisme à propos de la nature humaine. Il
propose de retourner à la radicalité de la Foi en Dieu, car Dieu
aime radicalement l’humain. Dans l’absolu rien ne plaide plus
pour le fanatisme religieux de Jéhu que pour la théologie des
épousailles d’Osée, ni plus pour la loi pragmatique de Moïse
plutôt que pour la radicalité évangélique. Je parle néanmoins
dans et pour la communauté chrétienne. Parmi ses disciples, il est
normal que Jésus-Christ soit l’interprète des Ecritures.
Jésus-Christ s’inscrit dans une tradition dans l’histoire de la
révélation offerte aux lecteurs et rédacteurs de la bible. Il
prend position pour le Dieu qui commande l’Amour du prochain. Il me
semble qu’Osée au premier titre se situe dans cette tradition.
Encore
une remarque sur le danger des citations bibliques sorties de leur
contexte pour fonder une théologie, une morale ou une idéologie. La
morale sexuelle catholique a été beaucoup organisée au cours du
XIXe et XXe siècle autour d’un prétendu interdit de perdre sa
semence,
déduite du « crime d’Onan » (Gn 38,8-10). Or le
contexte montre bien que ce n’est pas le coït interrompu qui
pourrait être la cause de la mort d’Onan, mais le fait qu’il
refuse par ce moyen de donner une descendance à la veuve de son
frère, ce qui dans la société de l’époque consiste quasiment à
la condamner à la mort sociale. Cette dernière interprétation est
confirmée par la suite du texte qui d’ailleurs nous ramène à la
thématique de la prostitution. Tamar en effet est en droit d’exiger
que le petit frère d’Onan lui donne un enfant. Mais Jacob son
père, ayant peur pour la vie de ce dernier, vu ce qui est arrivé à
ses deux premiers fils, le lui refuse, prétextant de son jeune âge.
Tamar est alors effectivement marginalisée. Elle doit habiter dans
son clan d’origine et n’y a pas de statut. Alors Tamar se déguise
en prostituée au moment où Jacob va au marché vendre ses bêtes.
Jacob devient son client sans la reconnaître. Pour salaire elle lui
demande un gage pour se faire payer plus tard. Elle conçoit un
enfant de cette passe. Jacob croit pouvoir la répudier puisqu’elle
a eu un enfant hors du mariage avec quiconque de ses fils. Tamar lui
montre alors son gage. Jacob doit reconnaître qu’elle a eu raison
et qu’il a été injuste. L’ensemble de la péricope semble
plutôt dénoncer l’égoïsme des hommes dans une société où les
femmes n’ont plus de statut si elles ne sont ni mariées ni mères
légitimes. Ce qui n’a rien à voir avec la contraception dans le
cadre du planning familial. Ou plutôt le planning familial est même
un moyen pour éviter aux femmes la précarité économique, et même
la mort, par de trop nombreuses maternités. Nous voyons d’ailleurs
que l’origine de la prostitution pourrait bien être décrite ici
dans ce passage biblique. Une femme peut être amenée à être
prostituée seulement dans une société qui précarise le statut des
femmes. La prostitution est très ancienne, mais ce n’est pas le
plus vieux métier du monde. Il est apparu dans un contexte
historique précis. Notons enfin que cette femme, bien plus qu’Onan,
devait représenter une importance particulière dans la lecture de
la Bible que faisaient les contemporains de Jésus, puisqu’elle
figure parmi les cinq femmes citées dans la généalogie de Jésus
par Matthieu. A noter encore que parmi ces cinq femmes figurent une
deuxième prostituée : Rahab !