jeudi 31 octobre 2013

31 novembre 2013 : 19 vieux « 343 salauds » en France, 1500 nouveaux abolitionnistes en Allemagne.





Drôle de parallèle dans le calendrier. Le jour où 343 salauds vomissent en France une pétition, expression du pire concentré  de machisme, Emma, revue féministe allemande, lance un appel pour l’abolitionde la prostiution. Un jour plus tard, les « 343 salauds » n’auront réuni que 19 signatures. L’appel contre la prostitution d’Emma en rassemble plus de 1500. J’ai eu la curiosité de regarder les signataires : ellils sont porteurres d’un grand espoir. Ellils sont des quatre coins d’Allemagne, et beaucoup d’Autriche et de Suisse. Quelques signatures d’allemands résidents à l’étranger. Il y a de nombreuxes étudiants et étudiantes, de tous les métiers (juristes, agriculteurres, entrepeneurres, journalistes…), des retraités, des représentants des partis de gauche comme de droite, des représentants des grandes églises, et surtout autant de femmes que d’hommes.

Cela fait plusieurs années que je me désespérais de l’absence de l’abolitionnisme en Allemagne en dehors de la revue Emma. Je me disais qu’il y avait une résignation. Que la loi ProstG qui avait légalisé le proxénétisme en 2002, non seulement a permit l’explosion du nombre de bordels, de clients et de victimes de la traite, mais surtout était parvenu à endormir les consciences et à pourrir les mentalités. Il faut croire qu’une portion notoire du peuple allemand trouve insupportable d’être devenu le pays au million de clients de la prostitution quotidien, aux 700 000 personnes prostituées sur son territoire, majoritairement des femmes, majoritairement originaires de pays étrangers. Il suffisait d’un appel pour faire apparaître cette opposition au système prostitutionnel outre-rhin jusque là invisible et silencieuse.

Rien n’est gagné. Il suffit de voir en France, la violence et la vulgarité des opposants au vote d’une loi qui permettrait de faire reculer concrètement la prostitution, en donnant des outils efficaces pour permettre de proposer des alternatives à la prostitution aux personnes prostituées, en renforçant la lutte contre le proxénétisme, mais surtout en indiquant clairement qui est responsable du système prostitutionnel : le client.

En Suède, une telle loi, appliquée depuis plus de 10 ans a fait reculer la prostitution, dans les fait puisqu’il y a deux fois moins de personnes prostituées alors que dans le reste de l’Europe occidentale sur la même période leur nombre a fortement augmenté, mais aussi dans les mentalités, puisqu’aujourd’hui en Suède une nette majorité de la population, y compris masculine, réprouve absolument l’idée même qu’un acte sexuel puisse être obtenu contre de l’argent. Voter cette loi en France, et surtout l’appliquer avec conséquences, c'est-à-dire avec des moyens attribués aux différentes mesures qu’elle prévoit, donnera un point d’appui encore plus puissant à l’utopie d’une humanité libérée de la prostitution. Ellils sont des millions déjà en Allemagne disponibles pour mener la même bataille qui a mené les abolitionnistes françaisse à la veille du vote de cette loi.

mercredi 23 octobre 2013

Pauvres femmes Ouest-allemandes

Traduction d'un article du journal féministe EMMA.

La nouvelle n’est pas une surprise, mais elle est tout de même choquante. La vague de pauvreté parmi les anciens, annoncée depuis longtemps, est arrivée : les plus pauvres sont les femmes de l’Ouest [de l’Allemagne]. 61% des femmes de l’Ouest doivent vivre avec moins de 600€ par mois, mais seulement 25% des hommes de l’Ouest, 28% des femmes de l’Est et 7,5% des hommes de l’Est. Indépendamment de la différence de genre, qui fait que deux fois plus de femmes que d’hommes reçoivent une telle retraite de misère, elles ont aussi deux fois plus souvent qu’à l’Est moins de 600€. Cela a à voir avec la vie des femmes, comme on dit si joliment : « la biographie des activités ».
Les femmes en RDA étaient en activité sans arrêt. Elles disposaient d’un nombre suffisant de crèches et de maternelles. Les femmes à l’Ouest étaient sous la pression du complexe des « mères corbeaux » [terme en Allemagne pour décrire les mères qui « abandonnent » leurs enfants pour continuer leur carrière] et elles ne sont que partiellement parvenu à retrouver une profession, quand elles y sont parvenu.  
De plus 61% des pensionnée à l’Ouest ne pourraient pas survivre, si elles ne vivaient pas avec un mari (tant qu’il est en vie).
C’est la mauvaise nouvelle. Et maintenant, la très mauvaise nouvelle : les pensionnées de demain et d’après-demain se dirigent en Allemagne vers une pauvreté dans la vieillesse tout à fait semblable à celle que vivent leurs mères et grand-mères.
Car les jeunes femmes sont encore sans activité des années durant, quand elles deviennent mères et/ou se contentent de temps partiels, ou pire. Que doit-il se produire, pour qu’enfin les femmes se réveillent ?
Traduction : Philippe Gastrein
EMMAonline, 23.10.2013

mardi 17 septembre 2013

De l'écosocialisme à la démocratie écologique

Intervention de David Hernandez Castro, des Ecosocialistas de la region de Murcia, aux assises de l'écosocialisme de Rodez (15 juin 2013).
-- Traduction: Philippe Gastrein
en castellano: aqui.

Chères ami-e-s,

De la part des écosocialistes de la Región de Murcia, nous souhaitons vous manifester le grand intérêt que nous portons au processus de convergence écosocialiste qui vous avez convoqué en France. Nous sommes très fiers que vous nous ayez invité à participé à une de vos assises [décentralisées de l'écosocialisme], et nous vous promettons que nous essaierons de diffuser votre travail et l'esprit de la constitution écosocialiste que vous êtes en train de promouvoir avec le soutien du Parti de Gauche, et de plusieurs autres collectifs qui nous accompagnent dans la lutte pour la justice sociale et l'environnement. Mais avant de continuer, permettez-moi de vous transmettre notre très profonde solidarité devant la mort du jeune Clément Méric, qui est la dernière victime de ceux qui veulent livrer le monde à la haine et aux cendres. Clément Méric n'est plus seulement un citoyen français. Il est devenu le porte-parole universel du rappel à l'Europe que le fascisme n'est pas seulement une chose qui appartient au passé, mais une menace réélle pour notre futur. La seule manière de vaincre le fascisme, c'est la solidarité des peuples.

Ecosocialistas de la Región de Murcia

« Ecosocialistas de la Región de Murcia » est un parti politique qui fait partie de Izquierda Unida. Nous nous sommes fondés en 2011, et notre implantation est la région de Murcia, dans le sud-est de l'Espagne, entre les communautés autonomes d'Andalousie et de Valence. Nous sommes donc une formation politique très jeune, mais nous avons une représentation institutionnelle, à travers IU, dans plusieurs communes de la Région de Murcia. Nous sommes au gouvernement de la mairie de Mazarron, où notre camarade David Fernández est actuellement conseiller à l'environnement et à la participation citoyenne. Dans notre parti, nous avons des activistes importants dans les domaines sociaux, syndicalistes et écologistes. Certains de nos camarades ont participé à la fondation de la « plateforme des victimes de l'hypotéque » (PAH), qui est à la tête de la lutte contre les expulsions, un terrible fléau dans notre pays, où déjà plus de 120 suicides se sont produits en lien avec les expulsions, et où une famille se fait expulser de son logement tout les 15 minutes. Murcia est une région particulièrement concernée par la bulle immobilière : grâce au soutien du Parti Populaire [parti rassemblant la droite depuis l'extrême droite héritière du franquisme jusqu'au « centre-droit »], notre zone côtière a été assaillie par les grandes entreprises de BTP, et notre système d'irrigation traditionnel de la huerta de Murcia a été systématiquement démantelé pour y construire à la place des grands lotissements, avec terrains de golf inclus. La région de Murcia possède des conditions extraordinaires pour la production agricole, et un savoir-faire traditionnel hérité des siècles passés pour la gestion durable de la terre et la production écologiste. Mais la cupidité de quelques uns a aboutit à la spoliation d'une grande partie de notre huerta, et à un grand péril pour les zones protégées de notre littoral. Nous, les écologistes, avons lutté durant 11 années pour arrêter un des grands projets du gouvernement régional, qui consistait en l'urbanisation de 11 500 hectares de paysages côtiers de «Marina Cope », où se trouvent 17 habitats communautaires, 16 espèces protégées de la flore et plus de 80 espèces de la faune locale, dont la tortue maure, et des variétés de rapaces comme le hibou royal. Après 11 années, nous avons remporté cette bataille, grâce au jugement du tribunal constitutionnel qui est tombé en faveur des demandes des écologistes. C'est la seconde fois en 40 ans que les écologistes sauvent ce magnifique espace protégé. La première fois a été dans les années 1970, quand le gouvernement a voulu y installer une centrale nucléaire. A l'époque déjà nous avions réussi à l'arrêter. Je vous raconte cette histoire, camarades, parce qu'il convient de se souvenir que l'histoire n'est pas écrite, nous l'écrivons avec nos luttes, et l'échec des puissants lobbys de l'énergie nucléaire et de la construction qui se sont briser deux fois contre Marina de Cope, témoigne qu'un autre monde est possible. On peut. Si on peut.

D'autres ecosocialistes en Espagne

En Espagne, il y a différents courants politiques qui se dénomment « écosocialistes ». Le plus ancien est « l'initiative pour la catalogne-Verds » (ICV), qui ont été des membres historiques des Verts européens, mais qui ont rejoint aussi Izquierda Unida aux élections territoriales. Récemment un parti politique s'est constitué au niveau de l'état espagnol, EQUO, qui est la synthèse de différents partis politiques verts, et que certains identifient avec les valeurs écosocialistes. Cependant, en Europe, ils gardent une alliance stratégique avec les Verts allemands, et, bien que nous respections les camarades de EQUO, et que nous désirions que leur projet politique fonctionne, nous pensons que les Verts allemands ne représentent pas aujourd'hui l'alternative écosocialiste dont l'Europe a besoin, une alternative qui ne s'oppose pas seulement aux centrales nucléaires, mais aussi aux guerres impérialistes, à l'Europe du capital, et aux attaques contre les conquêtes de la classe des travailleurs. C'est pourquoi nous pouvons nous reconnaître dans le Manifeste français des Assises pour l'Ecosocialisme. Nous allons débattre de ce document, et nous voulons initier un processus de convergence en Espagne similaire à celui que vous avez initié en France.




Sur la Démocratie Radicale

Nous avons beaucoup de choses à partager avec vous. Mais il y a un aspect où il nous semble que notre contribution peut être la plus intéressante. Notre organisation écosocialiste se définit autour de deux principes : la démocratie radicale et l'écologie sociale. C'est autour de la démocratie radicale qu'il nous semble que votre manifeste pourrait obtenir une meilleur définition. Nous pensons que la démocratie radicale n'est pas seulement un objectif pour le futur, un objectif que nous atteindrons quand nous aurons réussi à déterminer la planificación démocratique des ressources. Ce serait une vision étroite de ce que la démocratie signifie. En réalité, ce serait s'emprisonner dans la même logique instrumentale qu'ont eu historiquement les partis de la gauche alternative qui se sont caractérisés par la pratique d'un divorce entre les objectifs qui prétendaient poursuivre et la manière avec laquelle ils s'organisaient pour lutter pour ces objectifs. La racine de cette forme d'organisation est le centralisme démocratique, qui rompait avec la tradition politique d'organisation « assembléaire » qui remontait à la Première Association Internationale des Travailleurs. Depuis donc, et sauf quelques exceptions historiques, les formes d'organisation en assemblées sont restées restreintes au milieu anarchiste et libertaire, pendant que les sphères politiques du socialisme et du communisme s'organisaient à travers des structures représentatives d'organisation politique.

L'histoire personnelle de chacun d'entre nous est liée, majoritairement, de l'engagement militant dans des organisations politiques historiques. Notre proximité avec la forme de travail dans ces organisations a fait qu'il nous est difficile de prendre conscience de l'énorme contradiction qui s'introduit entre les fins que nous recherchons et les moyens que nous utilisons pour les atteindre. Nous voulons une société socialiste, où les travailleurs seraient les propriétaires des moyens de production, et où les décisions sur le destin de la communauté seraient adoptées de manière démocratique par ceux qui en font partie.

Souvent, quand le gouvernement de la nation approuve une loi injuste, nous initions une campagne pour que cette loi soit soumise à référendum entre les citoyens. Nous exigeons que les représentants politiques puissent être révoqués à tout moment par leurs électeurs. Nous voulons que la citoyenneté fasse partie de manière inaliénable du processus de planification démocratique des secteurs stratégiques les plus importants : l'éducation, la santé, l'économie. Et cependant, en même temps que nous nous battons pour ces causes, nous militons dans des organisations politiques qui sont organisées de manière hiérarchique, qui réunissent des congrès une fois tout les quatre ans, qui élisent leurs responsables politiques de manière indirecte, qui prennent leur décisions les plus importantes non pas à travers de consultations ou de référendum internes, mais derrière des portes fermées des organes de direction. Et cela nous semble normal. Nous croyons que nous sommes démocratiques participatifs parce que nous défendons la démocratie participative. Mais ce n'est pas le cas. Dans une certaine occasion, El Che Guevara a dit qu'un révolutionnaire est celui qui fait la Révolution. Nous pourrions ajouter : ce n'est pas en parlant de la démocratie participative que nous deviendrons plus démocratiques et participatifs, mais en la pratiquant. La démocratie est un sagesse de caractère pratique. C'est une constatation que les anciens savaient déjà, et qu'Aristote traita quand il écrivit que la vertu ne peut pas s'apprendre théoriquement, mais pratiquement, et qu'il ne s'agit pas de savoir qu'est ce que la vertu, mais de savoir comment être vertueux. Donc ce que nous disons, c'est que le vrai problème n'est pas tant de savoir qu'est-ce-que la démocratie participative, mais de devenir, nous-même et la société, des citoyens conséquemment démocrates et participatifs.

La democratie est une fin en soi

Ce que je pense, c'est que dans la réponse à cette question se joue le futur de la gauche européenne. C'est ainsi parce que nous nous trouvons à un carrefour que nous avons déjà rencontré au Xxème siècle. Ce n'est pas la première fois que nous subissons une crise mondiale. Et ce n'est pas non plus la première fois que suite à cette crise les classes opprimées parviennent à porter au pouvoir certaines de leurs organisations politiques. La question que nous devons nous poser est pourquoi ces expériences historiques ont échoué, et qu'est-ce-que nous pouvons faire pour éviter que l'histoire se répète au XXIème siècle. Pour nous, la clef se trouve dans la démocratie radicale, mais par seulement parce qu'elle serait une manière plus juste d'organiser le travail politique, mais parce c'est sur le terrain de l'organisation, de la forme avec laquelle nous construisons nos relations sociales, où se livre la bataille de la conscience. Contrairement à ce que pensent certains, ce n'est pas en lisant des livres que l'on devient socialiste. Sans doute, dans une certaine mesure, lire des livres aide beaucoup. Tout le monde devrait en lire. Mais c'était en lisant des livres qu'on devenait socialiste, comment expliquer que Dominique de Villepin proposa une facilitation des licenciements [CPE] quand il était premier ministre, et comment expliquer que nous connaissons tous des camarades qui sont beaucoup plus socialistes que nous-même alors que la vie ne leur a pas donné l'opportunité d'accéder aux études. Ceci, qui est une évidence, a été ignoré de beaucoup de dirigeants historiques de la gauche, qui ont formé une sorte de technocratie politique, valorisant la capacité et la qualité de l'engagement militant en fonction de son curriculum académique. Curieusement, ceci n'est jamais arrivé à Karl Marx, pour qui il a toujours été clair que pour autant que la lecture de ses livres aiderait, ce qui produirait réellement la prise croissante d'une conscience socialiste parmi les travailleurs serait l'association des travailleurs eux-mêmes.

Prenons un exemple : quel livre pouvons-nous lire pour apprendre à jouer de la guitarre ? Sans doute y-a-t-il de nombreux manuels de qualité. Mais tout le monde rirait de la personne qui prétendrait apprendre à jouer de la guitarre en s'enfermant dans une bibliothèque avec un manuel. Pour apprendre à jouer de la guitare, il n'y a qu'une manière : jouer de la guitare. Et la même chose est vraie pour d'autres compétences pratiques. Nous apprenons à faire du vélo en faisant de vélo. A nager en nageant. Ceci est vrai aussi avec les passions, et aussi avec les valeurs politiques comme la vertu républicaine. Nous apprenons à aimer en aimant ; à être solidaire en pratiquant la solidarité ; et à être républicain en menant une vie républicaine.

Ce semble être compliqué, mais en vérité, cela ne l'est pas du tout. Quand nous nous organisons pour faire ou décider des choses, notre activité se déploie dans deux sphères distinctes. D'un côté, il y a la dimension de la pratique concrète : nous nous réunissons, par exemple, pour discuter sur l'écosocialisme, ou pour décider quel sera la prochaine action revendicative. Mais d'un autre côté, dans le même temps qu'on réalise cette pratique concrète, il y a des valeurs précises qui s'inscrivent dans notre conscience. Au début, nous nous réunissons pour parler de l'écosocialisme, ou pour prendre une décision quelconque, mais durant le déroulement de cette réunion, nous allons nous rendre plus solidaires et participatifs. Arrive un moment où le résultat de notre délibération est le moins important : le plus important est que le fait de nous réunir nous a transformé en personnes plus sociables et plus solidaires, plus intéressées dans le destin de nos camarades, et aussi, plus experts dans la prise de décision. Il se peut que dans certains cas concrets nous nous trompons, mais se dont on ne peut pas douter, c'est que plus on participe à la prise de décision, mieux on apprend à prendre des décisions. Les vertus et les passions sont des qualités auto-amplificatrices : on apprend à mieux jouer de la guitare en jouant plus de guitare ; on aime mieux plus on aime ; et on devient plus solidaire quand pratique plus la solidarité.

Donc, la démocratie participative est une fin en soir. Le simple fait de participer, de s'impliquer dans la gestion de questions qui concernent tout le monde, de se réunir avec les camarades pour établir les priorités et les besoins de l'organisation et de la société, nous réalise comme personne, nous rend meilleurs, nous éduque dans ces valeurs de convivialité que la société du spectacle a relégué dans le dernier recoin. Participer, partager, coopérer, nous rend responsables et solidaires. Au contraire, la délégation instaure la culture de la passivité et de l'égoïsme. La délégation corromps la démocratie.

Sur la Democratie Ecologique

De plus, et pour conclure, il y a aussi une dimension écologique dans la participation démocratique. Il y a un principe en biologie qui relie la variété réelle des populations avec leurs possibilités de s'adapter à l'environnement, et donc de survivre. Non pas que nous devions importer aux relations sociales les principes d'organisation de la biologie évolutive. Mais nous pensons que dans ce cas concret notre forme politique d'organisation sortirait renforcée si nous prenions en compte ce principe. Il s'agit de considérer que l'ecosystème politique qui favorise le plus la gauche, ce n'est pas la lutte des organisations politiques de la gauche entre elles, mais l'articulation de formes d'organisation démocratiques plus riches et complexes, où les organisations et les tendances de la gauche peuvent déployer leur identité politique sans avoir à se rivaliser les unes contre les autres. Au contraire de ce que certains pensent, ce qui renforce une organisation politique, ce n'est pas une forme d'unité qui élimine les différences, mais une forme d'unité qui encourage la diversité. Les conditions sociales et politiques sont dans un processus constant de transformation, et plus les ressources politiques des organisations sociales sont variées, meilleure sera les capacités d'adaptation aux nouveaux défis du système. Nous faisons le pari de l'organisation d'un large front, parce qu'à l'intérieur de valeurs communes, nous sommes convaincus que la diversité des identités politiques favorise la prise démocratique de décisions. Le Front de Gauche est un bon exemple que cette idée peut donner des résultats très positifs. Pour cette raison, et pour d'autres sur lesquelles nous pourrions nous étendre, quand nous parlons de démocratie, nous parlons aussi de démocratie écologique. Le principe du respect de la diversité que nous défendons pour l'environnement fonctionne aussi à l'intérieur de nos organisations politiques.

Merci beaucoup.



dimanche 9 juin 2013

L'homme blanc et la négresse

Quand on remue la fosse septique, les pires odeurs nauséabondes s'échappent. C'est bien ce qui s'est passé avec le débat provoqué autour du mariage pour tous. En mobilisant autour de l'homophobie pour faire vivre une opposition de droite contre le gouvernement solférinien, ce sont les pires démons de la culture politique française qui se réveillent.

J'ai dans mon entourage plusieurs personnes qui se sont mobilisées contre le mariage pour tous. J'ai été très surpris par la vitesse avec laquelle elles se sont radicalisées. Elles, qui des années durant me sermonnaient quand j'identifiais les riches comme responsables des inégalités, tremblantes qu'elles étaient de me voir devenir un rouge mangeur d'enfants de bourgeois, se mettent maintenant à exprimer des propos d'une violence manifestement inacceptable contre des membres du gouvernement actuel, le président de la République évidemment, mais surtout la ministre qui a donné son nom à la loi qu'ils honnissent: Christiane Taubira. Souhaits de meurtre ou d'accident mortel, "blague" sur le physique... Les voilà entrain de proférer explicitement des horreurs sur des personnes humaines alors qu'il y a quelques années ils m'accusaient des pires intentions quand je ne disais ni plus ni moins qu'il était injuste qu'une personne gagne en un an ce qui nécessiterait des millénaires de salaire pour le commun.

Or justement, un autre ministre du même gouvernement solférinien se retrouve accusé d'évasion fiscal. Les faits ont été investigués par des journalistes, des vrais. La justice a par la suite obtenu elle aussi des preuves. Ce Ministre, M. Cahuzac, est démissionnaire. Certes ces mêmes personnes qui se sont découvert une telle fougue pour accabler Mme Taubira réprouvent son ex-collègue. Mais jamais je n'ai entendu de propos violents. Pas même le souhait que la justice fasse son travail, et le mène en prison par exemple.

Pourquoi cette différence de traitement? Est-ce pour des considérations morales? Car en fin de compte, c'est au nom de la bonne morale que ces gens-là se battent pour "sauver la famille". Mme Taubira avait annoncé qu'elle soumettrait au vote des assemblées la loi du mariage pour tous. Sur ce point-là, et peut être sur ce point seulement, M. Hollande réalise ce qu'il avait annoncé sur son programme de candidat en 2012. Il n'y a pas tromperie, ni mensonge. Il y a eu certes une tentative de faire passer en même temps que la loi des articles qui relèvent plus de la bioéthique, comme la question des mères porteuses. Ces aspects là ne sont pas dans la loi définitive dont Frijide Barjot dit, au lendemain du meurtre politique d'un jeune homme, Clément Méric, qu'elle serait la seule vraie violence politique dans notre pays. Par contre à considérer le cas Cahuzac, on voit un ministre du budget qui avait mandat de réformer le système fiscal, en particulier de relever à 75% la dernière tranche de l'impôt sur le revenu, et qui fraude le fisc à titre personnel depuis plusieurs années. La duplicité est énorme. S'il y avait un personnage dans ce gouvernement qui devait concentrer la révolte de personnes attentives à la morale, ce devrait être manifestement ce monsieur capillotransplanteur...

Voici la contradiction qui m'étonne dans les violences verbales de ces personnes: d'une part une ministre qui tient parole récolte les pires insultes, et de l'autre un ministre qui ment, triche, trompe et vole ne semble susciter pas même un désir de justice.

On me dira que la première applique une politique qu'ils détestent, tandis que le second applique exactement celle de Sarkosy, politique qui manifestement ne les a pas dérangé des années durant. Mais alors leur niveau de conscience civique est affligeant. Contradictions supplémentaire pour des gens qui se font les défenseurs d'une civilisation morale. Car en démocratie on aura toujours des contradicteurs. Et il se trouvera toujours à un moment ou un autre, sur un sujet ou sur un autre, que ce sont celles et ceux qui défendent un point de vue différent du mien qui emportera la décision de la majorité. Les appels à la violence contre les personnes qui incarnent cette décision de la majorité sont anti-démocratiques et dangereux. Par contre, même quand on est d'accord avec les idées réalisées, on doit s’inquiéter que des décisions soient prises par tromperie et manipulation. D'une part parce que, sans l'adhésion de la société, une nouvelle loi ne sera jamais bien appliquée. D'autre part et surtout parce que c'est le principe même de confiance dans les institutions démocratiques qui est ainsi sapé.

Mais de toutes ces considérations qui essaient de rendre raison à des manifestations de violences incompréhensibles, n'est ce pas un autre mécanisme beaucoup plus vil, et désespérant, qui se retrouve à l'origine de cette différence de traitement entre Mme Taubira et M. Cahuzac? Mme Taubira est une femme noire. M. Cahuzac est un homme blanc, riche, directeur d'une clinique d'implants capillaires. Ce qui motive les insultes contre la première, n'est-ce pas qu'il est inacceptable à ces gens-là qu'une négresse soit la Garde des Sceaux de la République Française? Et ce qui facilite l'indulgence vis à vis du second, n'est-ce pas que sa manière de s'enrichir leur est finalement tout à fait acceptable: il a été malin, et son erreur n'a été finalement que de se faire serrer. Il n'y a pas à l'accabler d'avantage. Presque on compatirait à son sort, se disant que si on avait pu s'enrichir de cette manière, on l'aurait fait volontiers.

jeudi 9 mai 2013

Marcha contra el paro y la precariedad 5: Arrivée à Carthagène

(Précédemment: 
)



7 Mai – Cartagena



Après un week-end passé à Paris pour participer à la marche pour la 6ème République, je rejoins avec ma belle-famille Cartagena pour assister à l’arrivée de la marche. De la marche de Paris, j’ai ramené un drapeau du Front de Gauche que nous laissons flotter au côté du drapeau républicain. Nous sommes plus d’une centaine à attendre la marche à l’entrée de la ville, entre le port industriel et la promenade sur la mer du centre-ville. Carthagène est un vieux port au fond d’une grande calanque. Son site rappelle un peu La Ciotat, ou même Marseille.  D’un côté de la rade, trois navires militaires, de l’autre côté les grues d’un chantier naval. La marche arrive. Ils sont aujourd’hui plus d’une centaine. Comme à chaque entrée de ville, le comité d’accueil et la marche se mêlent dans les embrassades, les applaudissements et les slogans.


 Puis nous prenons ensemble la direction du parlement de région. Arrivée dans le centre-ville piétonnier, la marche rassemble plusieurs milliers de manifestants. Nous traversons la rue commerçante. Les gens qui nous regardent passer sont pour la plupart des gens aisés, ou plus. Nous ne ressentons pas d’antipathie de leur part, ou rarement, contrairement à ce qu’on aurait pu craindre. Peu suivent l’admonestation scandée de temps en temps par les manifestants « Unite, no nos mire ! » (Rejoins-nous, ne nous regarde pas), mais beaucoup hochent la tête en assentiment devant nos slogans et pancartes. Nous ne suivrons pas jusqu’au bout la marche. Il nous faut rentrer donner à manger à notre fille qui est déjà fatiguée. Mais je suis heureux d’avoir pu rejoindre ces amis de marche pour leur arrivée. Comme à Murcia au milieu des milliers de manifestants du 1er Mai, ils ont été ici accueillis dignement. Au-delà des conséquences concrètes que pourrait induire cette marche, elle est déjà une réussite en un sens : celles et ceux qui l’ont faite ne sont plus des individus humiliés par le chômage, isolé les uns des autres et confrontés au regard méprisant ou condescendant de leur entourage, ce sont des femmes et des hommes qui se savent être des êtres humains en marche, qui ne sont pas seuls face à ce à quoi elles/ils sont confrontés, cette tricherie des dominants qu’ils nomment crise.

Entre les étapes de la marche contre le chômage et la précarité que j’ai suivi d’Archena à Murcia, la marche pour la 6ème République et cette arrivé à Cartagena, j’ai l’impression cette semaine d’avoir participé à une seule et même marche qui a lieu à travers toute l’Europe. Une même marche qui peut avoir la forme de petit ruisseau comme quand nous étions une vingtaine sous la pluie torrentielle, voire même avoir la forme d’une rembla à sec, en surface, comme quand je discutais il y a quelques mois avec Antonio, conseiller municipal IU d’Archena, qui me paraissait tellement fatigué et sans perspective dans son action politique, puis prendre la forme de fleuves puissants qui mènent vers l’immensité des océans.   
 



Marcha contra el paro y la precariedad 4: 1er Mai à Murcia

(Précédemment: 
)




1er Mai 2013, de Molina à Murcia



Avec cinq camarades d’Archena, nous retournons à Molina pour prendre le départ de la marche. Nous sommes déjà plusieurs centaines. Des bus sont descendus de Yecla pour rejoindre celles et ceux qui ont marché tous ces jours. Et puis beaucoup sont montés depuis Murcia. Les drapeaux de la République espagnole sont omniprésents. Aucun drapeau bicolore de la monarchie et du franquisme. Des slogans antifascistes retentissent quand la marche passe devant un bar qui affiche ce drapeau.



La marche rejoint la deux-fois-deux-voies qui mène à Murcia. Le ciel est clair, d’autant plus qu’il a été lavé par la pluie de la veille. Il fait frais, mais le soleil chauffe vite. Dès la première cote, les vestes tombent, et la marche s’étale. Le nombre paraît d’autant plus conséquent alors. Je chemine avec Antonio, le conseiller municipal IU d’Archena. Lui aussi s’étonne de l’ampleur des manifestations contre le mariage pour tous en France. La discussion nous mène à parler du chômage et du travail au noir dans les champs. En fait, même là les espagnols ont du mal à s’employer. Ce sont plutôt des immigrés qui sont engagés par les propriétaires des fincas. Par réflexe, je lui fais la remarque qu’il s’agit du vieux schéma de mise en concurrence des travailleurs. Il me détrompe. Le salaire horaire pour les immigrés est en moyenne de 5€. Ce qui fait 200€ pour une semaine de quarante heures, soit 800€ mensuel! Mais beaucoup d’espagnols acceptent de travailler pour 4 voire 3€ de l’heure. C’est que les espagnols ne savent plus travailler aux champs. Ils ont désappris. Antonio me raconte alors comment son grand-père était chevrier. Il  avait quelques dizaines de chèvre. C’était un travail qui supposait toute une « culture ». Lui-même a appris et saurait s’occuper des bêtes, mais ses enfants et petits-enfants n’en ont aucune idée. Il me raconte encore que son père avait deux cochons, quelques chèvres, des poules et des lapins. Ils habitaient au centre-ville d’Archena, à quelque pas du marché couvert actuel. Et tout le monde avait ainsi ses bêtes à la maison. Il faut s’imaginer l’odeur dans les rues d’Archena des années 1950 ! Quand ils coupaient les branches des citronniers et des abricotiers dans les huertas, ils les ramenaient pour donner le feuillage aux chèvres. Puis ils donnaient les branches aux lapins qui grignotaient l’écorce. Enfin, le bois qui restait séchait vite et servait pour le feu de cuisine. Aujourd’hui les branchages de taille des vergers sont brulés sur place, les lapins sont des grosses bêtes aux yeux rouges élevés en batterie et les enfants ne savent pas que les poules ont des plumes…

Puis je lui demande ce que c’est que d’être le seul conseiller IU dans une petite bourgade de la province de Murcia. Beaucoup de travail, surtout au début. Les veilles de conseils municipaux, il veillait jusqu’à quatre heure du matin pour préparer les dossiers et ses interventions. Surtout qu’à l’époque où il a commencé, c’était le boom immobilier, et le conseil municipal se réunissait souvent sur les questions d’urbanisme. Maintenant, c’est plus calme. Et puis, il a pris des habitudes. Il a appris beaucoup de choses. Il a moins besoin de travailler ses dossiers. Heureusement, parce que physiquement, il ne pourrait plus. Tout ce travail au conseil municipal est éreintant. Il est forcément en minorité. Parfois à 8 contre 9, avec les 5 conseillers PSOE et les 2 « divers droites », contre les 9 du PP. Mais aussi souvent tout seul. Et puis, depuis une réforme de Zapatero, certaines décisions peuvent être prises par la majorité sans débat au conseil municipal. Plusieurs décisions clef d’urbanisme ont été prises là. Alors Antonio a commencé à engagé des actions en justice. C’est une véritable rupture. Jusque là, il y avait un accord tacite entre partis : on pouvait tout se dire, au conseil pendant les délibérations, ou même par déclarations publiques. Une action en justice, c’est très mal vécu. Y compris parmi les militants IU, beaucoup étaient réticents. Il s’agit de dire que la maire, qui a remporté entre 60 et 40% des suffrages, mérite d’aller en prison. A Archena, tout le monde est cousins à un degré ou un autre… Il s’agit de deux projets immobiliers, où la mairie à donner le permit de construire, malgré un avis négatif de l’architecte officiel. Ce sont des cas de prévarication car une décision a été appliquée en sachant qu’elle était illégale. Seulement la municipalité a réussi à retourner la situation. Là où les plans déposés prévoyaient une vingtaine de logement, ce sont des centaines d’appartement qui ont été livrés. Du coup les raccordements d’électricité et d’eau ne sont pas suffisants. Aux personnes qui s’en plaignent une fois les logements livrés, la mairie répond que c’est la faute du procès en cours qui a fait obstruction au bon déroulement des travaux. Je me fais la réflexion en l’écoutant à quel point il faut soutenir humainement celles et ceux qui se mettent en avant dans nos actions, que cela soit en tant que porte-parole ou bien en tant qu’élu.

Vers midi, nous arrivons au rond-point qui marque l’entrée de la ville de Murcie. C’est là que confluent notre marche avec celle venu du Nord-Est de la Province. J’aperçois de loin Cayo Lara, leur porte-parole actuel de IU, entouré de micros. Au fur et à mesure que nous avançons dans l’avenue principale, nos marches se confondent avec le défilé syndical du 1er mai. Il y a du monde. Les discussions que nous avions avec Tete à propos du sens de cette marche prennent un autre relief au milieu de cette foule. Nous étions une cinquantaine tout au plus à Archena. Parfois même une vingtaine sous la pluie battante tranversant les huertas et leurs hameaux. Mais aujourd’hui, avec le beau soleil dans le ciel lavé par les pluies de la veille, nous sommes plusieurs dizaines de milliers. Je ressens la fierté que certainement partagent celles et ceux qui ont fait la route depuis Yecla. Elles/ils sont au chômage. Méprisés par beaucoup, et trainant jour après jour un sentiment de culpabilité même vis-à-vis de leurs proches qui pourtant savent comment elles/ils en sont arrivé.e.s là, elles/ils ont réalisés une prouesse physique et mentale et ce retrouvent aujourd’hui entourés des milliers de celles et ceux qui disent haut et fort que « ceci n’est pas une crise, mais une tricherie ».




Je retrouve dans la marche David Hernandez Castro, membre du parti « Ecosocialistas de laRegion de Murcia », que l’on m’avait présenté la veille. Nous reprenons la discussion entamée hier. Son parti a longtemps été un courant au sein de IU qui a essayé de faire accepter les principes de l’écoscocialisme, en particulier ceux qui ont trait à la démocratie interne. Depuis un an, ils ont décidé de se constituer en parti à part entière, pour pouvoir peser dans le fonctionnement de IU comme un partenaire parmi les autres. Il s’agit à la fois de constituer un parti à l’échelle nationale, qui fonctionne selon les principes écosocialistes de la démocratie « assembléaire » et de constituer une formation qui favorise l’entrée des militants de conscience écologiste dans IU, jusqu’à présent dominé par le PCE. En effet, en Espagne, contrairement à la France et à l’Allemagne, les électeurs sensibles aux enjeux de l’écologie sont quasiment confondus avec celles et ceux qui ont tendance à voter pour la gauche comme IU. Il n’y a pas vraiment d’environnementalistes de droites ou de verts-libéraux favorables au « capitalisme vert ». Los Verdes sont déjà engagés dans des coalitions électorales avec IU dans certaines communautés, comme Murcia, mais ne sont jamais membres à part entière de IU. Pour David, l’écosocialisme repose sur deux piliers : l’écologie sociale et la démocratie participative. En conséquence, l’organisation interne des écosocialistes doit correspondre à ce qu’elles/ils proposent pour la société. C’est pourquoi elles/ils sont très critiques contre les parti « traditionnels », en particulier ceux qui dans IU prétendent œuvrer pour un changement de système mais continuent de fonctionner de manière pyramidale, avec délégations de pouvoir. Les écosocialistes comptent elles/eux se réunir en congrès annuellement, contrairement au PCE et à IU qui renouvellent leurs instances et leurs orientations que tout les trois ou quatre ans. Lors des congrès écosocialistes, il n’y aura pas de délégations de vote. Chaque adhérent, et même sympathisant, pourra voter et participer aux débats, soit en étant présent, soit via des moyens de communications à distance. Pour l’instant, les écosocialistes étaient limités à la province de Murcia. Elles/ils commencent tout juste à étendre leur organisation sur l’ensemble de l’Espagne. Nous verrons comme cela marchera à l’épreuve des faits. David est directement impliqué dans la conceptualisation et l’organisation de la démocratie participative interne. Il écrit d’ailleurs en ce moment même une thèse sur le sujet. En discutant avec lui, j’ai l’impression de me retrouver dans la position de l’arroseur arrosé. Plusieurs fois ces derniers jours, je parlais au gens que je rencontrais dans la marche de l’écosocialisme en train d’être formulé par le parti de gauche en France. Et je découvre une forme d’écosocialisme peut être plus avancé sur certaines questions, en tout cas qui pourrait nous donner des leçons, à nous qui à l’évidence fonctionnons (encore) comme un parti traditionnel. En tout cas les écosocialistes de Murcia affirment sans détour que la démocratie participative fait partie intégrante du projet de l’écosocialisme, et que les organisations qui le portent doivent mettre en pratique en leur sein cette forme de partage du pouvoir. David m’enverra des liens de ses publications. Beaucoup de documents de haute portée philosophique et théorique à étudier en espagnols !

Le défilé du premier mai arrive à son terme, devant le vieux pont sur le Segura. Pepe me dit que d’après la surface occupée par la manifestation, nous serions plus de 50 000, là où d’habitude entre 2 et 3000 personnes se réunissent pour le 1er Mai, 5000 les années de grande mobilisation. Le soir je lirai sur les journaux (de gauche) que nous étions 15 000. Nous étions là, et nombreux, c’est ce qui compte. Beaucoup de gens portant le T-shirt vert appelant à la grève générale de l’éducation pour le 9 mai. Des drapeaux de toutes les organisations de IU, mais aussi hors de IU la Izquierda Anticapitalista (le NPA espagnol), et quelques groupes socialistes. Et évidemment les syndicats dont on m’a fait une explication sur leur positionnement. Les commissions ouvrières (CC.OO, l’équivalent de la CGT française, historiquement proche du parti communiste), la CNT avec ses fameux drapeaux noir et rouge, la CGT (qui est une scission de la CNT), et l’intersindical avec qui je marchais, qui a longtemps était surtout présent parmi les enseignants (sous le nom de STERM) et qui s’élargit à toutes les catégories professionnelles (d’où son nouveau nom). Je retiendrai la courte discussion avec une délégation des CC.OO. réunissant des travailleurs sénégalais. Je leur demandais s’ils ne souffraient pas du racisme. Il est ici tellement présent que ceux d’entre eux qui ont été en France disent n’en pas ressentir chez nous. Les drapeaux de la République dominent partout. Ici, on demande l’établissement de la troisième République. Les slogans les plus souvent repris sont : « Si se puede, no lo quieren » (Si on peut, ils ne veulent pas), « nous ne paierons pas leur dette avec l’éducation, la santé, … », « ceci n’est pas une crise, c’est une tricherie/guet-apens », etc.  

A suivre...