Philippe Gastrein
L’évolution en Espagne des mouvements sociaux et des propositions
politiques assorties sont pour nous, en France, objet d’inspiration. Cependant
nous nous en faisons souvent une vision idéalisée, voire mythifiée, qui nuit à
la transposition dans le contexte de français de propositions politiques
pertinentes. Déjà le Mouvement du 15 Mai (souvent nommé chez nous
« des Indignés ») a fait rêver celles et ceux qui cherchent à
faire vivre une forme de démocratie radicale, spontanée et assembléaire. Non
seulement ce mouvement fut un feu de paille qui disparût des places après
quelques mois, mais surtout on pourrait lui reprocher d’avoir raté le
rendez-vous des urnes lors des élections anticipées de 2011, et d'avoir ainsi
laissé Rajoy prendre le pouvoir pour appliquer l’austérité à la sauce PP.
Aujourd’hui Podemos est perçu par beaucoup comme la continuité des Indignés, y
compris en Espagne. Or le mode d’organisation de Podemos consiste en l’exact
contraire de la démocratie horizontale expérimentée sur les places par le
mouvement du 15M. Il s’agirait plutôt d’un centralisme cybercratique (voir
supra) dont les contradictions risquent d’apparaître très porchainement, faisant
de Podemos un second feu de paille dans l’histoire espagnole.
Il me parait important de bien comprendre les fragilités de ces deux
expériences espagnoles afin de trouver les bons équilibres pour réaliser ici en
France des Assemblées Citoyennes (AC) qui articulent implication citoyenne
large et crédibilité politique dans la capacité à prendre et assumer le
pouvoir.
En effet, nous avons en Espagne, d’une certaine manière, des expériences
politiques qui explorent les limites de deux logiques antagoniques.
Les indignés, faiblesses de la démocratie radicale tout de suite.
D’une part le 15M s’est construit avec la conviction qu’il faut appliquer
tout de suite la démocratie sous sa forme radicale et idéale : pas de
délégation, décision au consensus…
A l’échelle de l’Histoire
espagnole, cette radicalité a justifié le refus de participer aux élections
anticipées de novembre 2011, ni même d’appeler à voter pour aucun parti.
L'écrasante victoire du PP qui s’en est suivie a permis aux partisans de
l’austérité d’approfondir le traitement de choc initié par le PSOE de Zapatero.
Le PP y apportant sa « touche » répressive et réactionnaire, en
particulier dans le domaine de la répression du mouvement social (lois
anti-syndicalistes, loi anti-manifestations, mesure de criminalisation des
militants s’opposant aux expulsions, etc.) et la remise en cause de droits
fondamentaux (recul du droit à l'IVG, etc.).
Au-delà de ce raté
stratégique, qui pourrait être imputable à la naïveté sympathique du mouvement,
ceux qui y ont participé rapportent un essoufflement interne. L’exigence
de consensus rendait les décisions impossibles, pire donnait le pouvoir de
décision aux plus acharnés, aux plus agressifs. En effet, aucune décision ne se
prenait tant qu’un seul participant de l’assemblée croisait les bras. Du coup
les argumentations continuaient. Les participants les moins motivés, ceux qui
continuaient à avoir une activité professionnelle ou avaient des obligations
familiales, finissaient par quitter l’assemblée, et la décision « au
consensus » se prenait à 2h du matin, entre les restants, ceux qui
dormaient sur place… Nous avons observé
les mêmes phénomènes en France autour des ZAD…
Podemos, faiblesses du centralisme cybercratique.
Podemos,
d’autre part, s’organise de manière diamétralement opposée, quoiqu’en pense
ceux qui restent persuadés qu’il s’agirait d’une continuité du 15M. L’exécutif
du nouveau parti n’intègre aucune minorité, et est composé d’un cercle resserré
de proches de Pablo Iglesias. Le succès populaire de Podemos doit beaucoup au
charisme médiatique de son leader. Du coup, les décisions prises par vote
internet suivent largement les avis de celui-ci, indépendamment des discussions
qui peuvent avoir lieu sur le terrain entre militants. On assiste en quelque sorte
à un « centralisme cybercratique ». Cette forme d’organisation ne
génère pas de militantisme sur le terrain. Elle démontre même que le
« cyberactivisme » ne remplace pas le militantisme de terrain. Plus
encore, le succès de Podemos dépend de la couverture médiatique qui lui est
accordée, et donc doit sacrifier sur le contenu de son discours pour être
accepté par le formatage médiatique.
S'inspirer du 15M et de Podemos, tout en évitant
les écueils.
Dans notre projet de faire vivre des AC, ces deux expériences ne sont pas à
négliger. Premièrement parce que chacune porte des aspirations auxquelles nous
voulons répondre (exigence d’organisation plus horizontale, ambition
d’expérimenter des formes de démocratie radicale pour le 15M ; ambition de
prendre le pouvoir pour de bon, et donc de rassembler une majorité, sans se
faire récupérer par la « caste » ou « l’oligarchie » pour
Podemos). Deuxièmement, parce que ces faiblesses induites par des choix
extrêmes dans les formes d’organisation sont autant de leçon qui peuvent nous
permettre d’éviter ces travers.
Essayons de formaliser la méthode d’implication citoyenne, en particulier
l’articulation entre organisation en assemblées et soutien des partis déjà
constitués.
Résumons d'abord l’expérience d’Aveyron Majorité Citoyenne menée
avec un certain succès (Pour plus de détails, lire cet article de Guilhem Serieys) pour les dernières élections
départementales :
Rassembler une base de soutien citoyen le plus large possible.
La méthode suivie a été de proposer la signature d’un appel dans les
réseaux politiques et dans le mouvement social. Cet appel était court. Il
cadrait l'orientation politique des signataires avec 3 marqueurs politiques
clairs et concis : refus et indépendance vis-à-vis de la politique
gouvernementale austéritaire, refus de la réforme territoriale en l’état,
opposition au projet de Grand Marché Transatlantique (GMT). Et surtout il
proposait une méthode : co-élaboration du programme et désignation des
candidats en AC.
Nécessité d'impliquer les partis politiques susceptibles d'être en
cohérence avec la démarche au plus tôt.
Le relatif succès qu’a rencontré ce texte (200 signatures en un mois,
presque 300 après la campagne) a été largement obtenu grâce au soutien des
partis politiques à la démarche, en particulier du PCF et du PG. Ainsi, second
aspect de méthode, il est important d’impliquer les partis et les collectifs en
amont pour s’assurer de leur soutien à la démarche.
Assurer une démarche citoyenne sincère.
Ensuite, au cours de la campagne, là où la dynamique des AC a prise, c’était
là où les citoyens n’avaient pas l’impression que tout avait déjà été décidé
par les partis. En effet, pour rendre possible la démarche à l’échelle
départementale, il a fallu recourir sur certains cantons à des accords
d’appareil « à l’ancienne ». Ce sont sur ces cantons où nous
constatons la moindre progression électorale d’AMC, comparée aux résultats du
candidat Front de Gauche à la présidentielle de 2012. Cependant, on voit des
militants politiques aguerris prendre goût à cette forme d’implication citoyenne,
y compris là où elle n’a pas été réalisée dès le départ de la campagne.
Laisser la créativité collective expérimenter hors des vieilles habitudes
des partis.
Enfin, dans le processus de co-élaboration du programme, les militants
politiques des partis se sont fait un peu bousculer sur leur habitude de
dénoncer et ainsi de se positionner systématiquement comme opposants. Les
participants aux AC pour qui il s’agissait souvent d’une premier engagement
politique refusaient d’organiser le discours de campagne autour d’une
dénonciation du personnel politique adverse, mais plutôt autour de propositions
positives et concrètes de ce que nous ferons une fois au pouvoir. Ce discours
positif, a posteriori, a certainement été parmi les facteurs du relatif succès d’AMC
dans les urnes.
La crédibilité se gagne en chemin.
Après les élections, l’envie est forte parmi les participants des AC de
continuer la démarche. Surtout, on constate un certain gain en crédibilité de
la démarche, puisqu’en certains endroits les AC organisées après le premier
tour attire plus de participants qu’avant, notamment des citoyens précédemment
engagés dans des démarches de citoyenneté participative, proche dans la méthode
avec AMC, mais qui étaient resté de côté pendant la séquence électorale.
Enjeux de la démarche citoyenne
Au niveau théorique, l’enjeu de la démarche est de répondre à une
aspiration profonde chez nos contemporains d’un réel renouveau de la
démocratie. Plusieurs signes
indiquent qu’une majorité de nos concitoyens veulent prendre part aux décisions
qui les concernent. Non seulement en ont-ils le désir, mais surtout en ont-ils
les capacités. Le niveau d’éducation et les modes d’organisation du travail qui
ont poussé à l’autonomie individuelle font que chacun se sent capable de
décider sur les grandes questions qui le concernent, mais surtout supportent de
moins en moins que ces questions soient traitées de manière manifestement
inappropriée et opaque. Cependant ces mêmes raisons font que cette génération
avide d’autonomie est incapable de s’organiser collectivement. Il est donc
illusoire de croire qu’un mouvement spontané émergera de ces aspirations. Nous
avons la responsabilité de proposer un outil politique pour que cette
génération s’en saisisse. Notre responsabilité est d’autant plus grande que le
niveau de dépolitisation de la population est telle qu’un outil d’expression
citoyenne similaire, mais avec un contenu ultralibéral, voire xénophobe, en
résonnance avec l’individualisme ambiant, aura certainement le même succès. Pour
autant, cet individualisme ne rentre pas forcément en contradiction avec une
aspiration à la solidarité. Surtout il peut être contrecarré par l’argument
rationnel que les grands problèmes auxquels chacun est confronté (précarité
économique, dégradations environnementales, etc.) ne peuvent être réglés que
par des solutions collectives.
Pour répondre à cet enjeu, il est nécessaire de proposer donc un outil
politique crédible et sincère.
C’est là où le rôle des partis est critique. Sans le soutien des militants des
partis clairement engagés dans la lutte contre l’austérité, pour la solidarité
et la transition écologique, aucun mouvement citoyen ne réunira la crédibilité
nécessaire pour entraîner derrière elle un nombre significatif de citoyen.
Cependant, ce qui freine autant l’adhésion populaire autour d’un projet
d’implication citoyenne, c’est la suspicion quant aux intentions manipulatrices
des partis. Il faut reconnaître à cette suspicion l’expérience malheureuse,
parfois traumatisante, de précédents où l’on a vu des partis tenter de
récupérer de telles initiatives parfois pour les trahir. Il s’agit donc de
garantir la sincérité de la démarche. C’est pour cela qu’il est important de
n’accepter des accords d’appareil que pour garantir la sincérité et la transparence
de la démarche. Surtout, il importe de bien penser les règles de prise de
décision : convocation d’AC sur la base des signataires à l’appel,
co-élaboration en assemblée des éléments programmatique, désignations des
candidats en assemblée, etc. C’est là aussi où il importe de définir les
relations entre futurs élus et AC : charte d’engagement, charte ANTICOR…
Il faut bien veiller à ce que l’engagement des futurs élus vis-à-vis des AC ne
constitue pas une concession à la tendance consumériste des citoyens. Il s’agit
au contraire que cet engagement soit réciproque : là où le futur.e élu.e
s’engage à présenter les dossiers sur lesquels il aura à statuer, les AC
s’engagent à les travailler avec lui et à rédiger avec lui des
contre-propositions, voire à établir des contre-expertises en s’appuyant sur
les compétences présentes dans l’AC ; là où l’élu.e s’engage à faire
entendre les revendications du mouvement social dans les institutions, les AC
s’engagent à relayer et appuyer par leur mobilisation militante les
revendications qui ont été défendue dans les institutions…
Pour les partis, et surtout pour les militants de ces partis, il s’agit de
ne pas oublier les raisons profondes pour lesquelles ils ont adhéré à leur
parti, ne pas oublier qu’il ne
s’agit pas d’une adhésion à un nom, un sigle, une histoire, mais bien la
volonté de changer les choses, et pour cela de convaincre une majorité de ces
concitoyens de choisir un certain type de politique. Il s’agit donc de se
convaincre que les AC sont l’outil politique pertinent pour atteindre cet
objectif. Pour autant, cela ne signifie pas la dissolution des partis pour
cause d’inutilité. Au contraire l’existence de collectifs organisés comme le
sont les partis est essentiel à la réussite de la démarche d’implication
citoyenne. Les partis, de par leur expérience historique, seront
particulièrement vigilants aux tentatives de récupération du mouvement par
ceux-là même qui ont tout intérêt à ce que rien ne change. Les partis apportent
une capacité d’organisation et de planification qui a du mal à émerger
rapidement dans un collectif nouvellement constitué : prévoir les
échéances électorales, envisager les rythmes militants dans le temps, anticiper
des chocs externes (manœuvres des adversaires, événements internationaux,
cycles économiques, etc.), savoir-faires militants (conception et diffusion de
matériel de propagande, organisation de meeting, services d’ordre, etc.)…
Surtout les partis, de par leur assise nationale, et parfois internationale,
sont plus en mesure de réaliser une coordination du mouvement à grande échelle
géographique (grande région, nation…).
Ce rôle des partis dans le soutien aux AC implique forcément de
reconsidérer l’activité interne de ces partis. En premier, il s’agit d’affirmer que le soutien aux
AC ne devient pas la seule activité des militants. Des réunions internes
régulières restent nécessaires pour échanger et concevoir une analyse politique
cohérente de la situation politique au fur et à mesure de son développement. Ce
travail de réflexion étant nécessaire pour ensuite alimenter le travail des AC.
Il importe aussi que le parti continue à avoir une activité de formations
internes, tournées vers des tâches militantes utiles aux AC : animation
des AC qui favorise la parole de tous (par exemple, scénarisation qui empêche
la monopolisation de la parole par quelques uns fort en gueule…), mutualisation
des savoir-faire militants, etc.
Le processus d’AC que nous
envisageons constitue en soi un outil d’éducation populaire. Dans la pratique même des AC, nous apprenons
collectivement à faire vivre une démocratie plus profonde, plus authentique.
Mais aussi, il s’agit de ne pas perdre de vue les enjeux sociaux, économiques
et environnementaux que doivent relever notre société. Il s’agit aussi dans les
contenus des échanges en AC de politiser les questions. Ne pas avoir peur des
questions ultra-locales du quotidien, mais de faire l’apprentissage collectif
de l’articulation entre ces questions et des enjeux plus globaux, surtout
d’apprendre à traiter ces questions collectivement dans la perspective de
l’intérêt général.
Elargir la méthode d'implication citoyenne à
l'échelle de la grande région LR/MP.
Notre ambition aujourd’hui est de transformer cet essai pour l’élargir sur
la grande région. A cette échelle, nous devrons avoir recours aux outils de
consultation par internet. C’est là où le modèle Podemos doit être bien
considéré, de manière critique.
Reprenons les points de méthodes appliquées pour Aveyron Majorité
citoyenne.
Rassembler une base citoyenne crédible à travers un appel régional, cette étape est en cours, et ne devrait pas
poser de difficultés insurmontables, sinon les difficultés relationnelles
habituelles dans les relations unitaires.
Nécessité d'impliquer les partis politiques susceptibles d'être en
cohérence avec la démarche au plus tôt. Là aussi, la difficulté théorique n'est pas énorme. Sans négliger pour
autant les difficultés pratiques auxquelles nous seront vitre concrètement
confrontés. Nous y avons déjà répondu par l'établissement d'un calendrier serré
pour prendre les autres organisations de vitesse.
Assurer une démarche citoyenne sincère.
C'est là où cela va être le plus compliqué. Autant
pour les départementales, on a pu légitimement organiser des AC par canton,
pour les régionales il faudra co-élaborer un programme avec des AC sur 13
départements, et faire émerger des listes de candidats pour chacun de
département, et enfin décider d'une tête de liste unique (ou binôme?) pour
toute la nouvelle grande région. C'est dans ce processus compliqué qu'il faudra
s'inspirer de manière critique de ce qui s'est passé ces dernières années en
Espagne. Le travers de l'organisation horizontale sera certainement rapidement
repoussé, vu les échéances à respecter, et surtout vu que l'objectif dès le
début sera de se présenter à une élection. Les partisans inconditionnels de la
démocratie radicale ne seront certainement pas de la partie. Par contre, il
s'agira d'être vigilant sur les travers du centralisme cybercratique à la
Podemos. Ce travers ne viendra certainement pas par une main mise par un petit
cercle hiérarchisé sur l’organisation,
ou sinon les deux premières étapes de notre projet auront été des échecs. Il
faudra plutôt batailler pour éviter de tomber dans un autre travers :
celui de s'enfermer dans des accords d'appareil en préalable aux travaux des
AC. Ce sera à mon avis un des rôles majeur du parti de gauche : assumer
des transactions d'appareil, d'y faire peser ce qu'il peut dans le rapport de
force, mais pour la finalité de faire vivre la démarche citoyenne de la manière
la plus dégagée possible des logiques et des intérêts d'appareil.
Par contre une forme de « centralisme
cybercratique » peut se mettre en place qui court-circuite l'importance
des discussions et des décisions prises sur le terrain en AC, et transforme la
démarche citoyenne en une sorte de forum politique où l'emporteront les plus
aguerris dans le cyberactivisme. En particulier, dans le choix des candidats,
ne pouvant se connaître physiquement dans des assemblées, ce sont des
personnalités déjà connues, et en mesure
d'organiser des formes de marketing politique sur les réseaux et dans les média
conventionnels, qui obtiendront selon toutes probabilités le plus de suffrage.
Pour éviter ce travers, nous devons tout inventer,
car nous n'avons aucun modèle. Je liste ici quelques idées personnelles qu'il
s'agira d'enrichir ou contredire dans nos réflexions communes.
Nous disposons déjà d'un outil informatique, développé
dans le cadre du m6r. Pour moi, le fait qu'il s'agisse d'outil fait avec des
logiciels libre, et dans l'esprit du libre, compte tout particulièrement.
Il faut penser par ailleurs une articulation obligatoire
entre AC « réelle » et débat et prise de décision sur le réseau. Les
documents de base pour le programme devront par exemple forcément émerger de
forums départementaux, interdépartementaux ou régionaux. Ensuite seulement ils
pourront être soumis à des processus de discussion et d'amendement par
internet. Mais toujours avec des contributions remontant d'AC locales. Il s’agira d’instituer des porteurs de parole (ou secrétaires) qui réunissent à l’occasion de chaque AC des éléments qui
enrichissent le programme, qui relèvent des questions qui émergeraient ici, et
qui pourraient trouver réponse dans le cadre d’une autre AC, etc.
Pour ce qui est des candidatures, on pourrait
imaginer sur le même principe que tout candidat doit être présenté par une AC,
et refuser des candidatures personnelles.
Enfin, pour dégonfler le risque d'inflation
« marketing » sur les personnalités, qui nous ferait basculer in fine
dans un système de primaire à l'étasunienne, on pourrait imaginer d'introduire
du tirage au sort parmi des candidats légitimés par les AC et le vote des
signataires de l'appel (voir proposition d'un mode de désignation des candidats
dans un troisième article).
Pour conclure, il s’agit de ne pas perdre de vue l’objectif de société que
nous nous donnons. Pour moi, l’écosocialisme présuppose la conviction que
l’intelligence collective est supérieure au génie de quiconque pris isolément.
Il s’agit pour autant d’être lucide sur la situation matérielle et culturelle
de nos sociétés. L’application de but en blanc de méthode démocratique radicale
sera condamnée à l’échec du fait des inégalités économiques qui permettront
toujours à quelques uns de corrompre, et du fait de notre manque de maturité
collectif. Il suffit de participer au fonctionnement de n’importe quelles
associations pour se rendre compte à quel point est répandu parmi nous
l’attitude d’être « démocrate » tant qu’on n’est pas en
responsabilité, et à quel point le pouvoir, dans des institutions
déresponsabilisantes, corrompt. La grève civique qui s’exprime par l’abstention
relève essentiellement d’une rupture de confiance entre les outils politiques
existants et la majorité de nos concitoyens. Les AC doivent avoir l’ambition de
retisser cette confiance civique qui est absolument nécessaire à la paix dans
nos sociétés. Nous devons donc assumer d’en faire des lieux d’éducation
populaire, polarisés pour des choix de sociétés clairs : solidaires et
écologiques.