Extrait de la table ronde organisée par le CCFD "Débat gouvernance: vers un rôle nouveau des acteurs, des territoires et des Etat-nations"; intervention de Gaël Giraud, économiste et Jésuite.
30'23''
"Je reviendrais volontier sur l'expérience islandaise (...) qui me semble absolument fondamentale. (...) Je résume en 15 secondes: L'Islande jusqu'en 2007-2008 était candidate pour rentrer dans l'Union Européenne. L'Islande, c'est 320 000 personnes. Donc c'est un arrondissement parisien. Et l'Islande en 2008 a explosé en vol parce que les trois plus grosses banques islandaises avaient accumulé sept fois le PIB du pays en dette. Les trois plus grosses banques islandaises étaient en faillite. Elles ont toutes été nationalisées du jour au lendemain. Donc l'Etat a repris les dettes de ces banques, mais à la différence de l'IRlande, l'état islandais a dit nous ne rembourseront pas les dettes détenues par des créanciers non-islandais, non-résidents. Cela, tant pis pour eux, bah ils ne récupéreront jamais leur argent. Ils ont fait des paris. Ils ont fait des investissements leur argent de manière hasardeuse. Il n'ont qu'à assumer les choix qu'ils ont fait: c'étaient de mauvais choix. L'Irlande, par contraste, a nationalisé également toutes ses banques, qui étaient également toutes en faillite, comme vous le savez, en Octobre 2010. Mais sous la pression de l'Union Européenne, a dit: "bien sûr, nous sommes gentle man, donc nous allons rembourser la totalité des dettes de nos banques." De sorte que la dette publique irlandaise a été multipliée par quatre en un an, puisque l'Etat a repris à son compte les dettes de ces banques. D'où la situation dans laquelle se trouve l'Irlande aujourd'hui. L'Islande, actuellement, renoue avec la croissance (Alors je ne suis pas du tout favorable à la croissance. Mais sa prouve que quand vous annulez les dettes des banques, ça marche). Et est entrée dans un processus de rédaction de sa constitution qui de fait est tout à fait nouveau, absolument inouï en Europe. Alors comme vous le savez, il y a eu deux réferendum successifs, à une année d'intervalle, pour savoir si les Islandaisses ne voulaient pas quand même rembourser un peu les dettes de leurs banques. Ca, sous pression évidemment de la grande-Bretagne et des Pays-Bas, parce que les principaux créanciers lésés se trouvaient aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne. Deux fois de suite la population islandaise a dit non. Puis s'est lancée dans la rédaction de la constitution. Alors pour ça il y a eu un grand appel populaire. On a demandé à tout les islandais qui avaient plus de, je ne sais plus combien, 21 ou 25 ans, qui connaissaient plus de 30 amis pouvant témoigner pour eux que ils étaient normalement constitués, qui pouvaient se porter candidat pour être rédacteur de la constitution. Il y a eu quelque chose comme 550 candidats qui se sont déclarés, parmi lesquels 25 ont été désignés. Alors c'est un processus, vous voyez, absolument inouï. D'une certaine manière, moi quand je vous entends parler de la démocratie 2.0, je suis tout à fait d'accord: il me semble que l'Islande est entrain en Europe d'inventer la démocratie 2.0. Dans le reste de l'Europe, nous somme entrain d'inventer la démocratie -1.0. C'est-à-dire celle où vous avez trois gouvernements qui ont sauté alors qu'ils étaient démocratiquement élus, sous la pression des marchés financiers: en Irlande, en Grèce, en Italie. Alors évidemment, quand c'est en Italie, et que c'est Berlusconi, tout le monde est content. Mais en Grèce, c'était Papandréou, qui lorsqu'il est arrivé au pouvoir a tout de suite dit que les comptes étaient faux. Ce n'est pas lui qui a falsifié les comptes grecs en 2001. Et en Irlande non plus. Donc ce sont trois gouvernements démocratiquement élus qui ont été remerciés sans autres formes de procès par une procédure qui échappe à tout controle démocratique, pour être remplacé par qui? En Grèce, vous l'avez vu, et en Italie également, par des techniciens qui sont tous les deux des anciens cadres de Goldmann Sachs. Tout comme à la Banque Centrale Européenne on a remplacé M. Trichet par Mario Draghi, qui est lui même un ancien cadre de Goldman Sachs. Donc c'est très impressionnant, en particulier en Grèce, puisque que on a mis au pouvoir quelqu'un qui fait partie du parti conservateur grec qui a falsifié les comptes en 2001, et qui a été un cadre de Goldman Sachs, qui est la banque qui a aidé la Grèce à falsifier ses comptes en 2001, au moment de l'entrée dans la zone Euro de la Grèce. Donc ça c'est la démocratie -1.0."
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