Proposition pour un
processus de désignation du-de la candidat-e insoumis-e à
l'élection présidentielle 2022.
Je propose ici un processus pour éviter
des luttes de personnes mortifères mais à même de désigner un-e
candidat-e qui incarne un projet politique collectif tel que celui de
la France Insoumise.
Résumé du processus :
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étape 1 : définir collectivement une « fiche de poste » à contenu politique qui décrit ce que l'on attend d'un candidat à la présidentielle ;
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étape 2 : sélectionner entre 5 et 8 personnes qui correspondent à cette fiche de poste
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étape 3 : faire valider par vote le groupe de candidats potentiels
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étape 4 : tirer au sort parmi les candidat-e-s potentiel-le-s qui sera effectivement candidat-e à la présidentielle
Les élections présidentielles en 5°
République sont quasiment le seul moment où on peut réellement
prendre le pouvoir pour changer à la fois les équilibres
économiques de la société et les institutions qui organisent la
démocratie.
La France Insoumise a pour objectif
politique de convoquer une assemblée constituante dès que possible,
donc le plus probablement après avoir remporté cette élection-là.
Nous sommes face à une difficulté
dans la désignation du – de la candidat-e pour cette élection.
D'une part nous nous méfions collectivement de toute
personnalisation excessive du débat politique.
D'autre part le cadre imposé par
l'élection présidentielle oblige à mettre en avant une
personnalité forte.
L'élection présidentielle 2017 a été
l'occasion de construire le mouvement de la France Insoumise autour
de la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Le contenu politique de
cette candidature était essentiellement le refus de la primaire à
gauche, qui aurait vraisemblablement piégé les partisans d'une
gauche radicale dans le soutien d'un candidat ultralibéral, du genre
Clinton. Le second geste de la France Insoumise a été d'écrire
collectivement un programme, l'Avenir en Commun, qui représente son
identité, plus que tel ou tel personnage.
Aujourd'hui, au lendemain des élections
européennes, beaucoup d'insoumis autour de moi souhaitent que
Jean-Luc Mélenchon ne soit pas candidat aux prochaines élections
présidentielles. Il est important de bien contextualiser un tel
souhait. Il ne s'agit pas de remettre en cause la personne. Au
contraire, il s'agit d'avoir bien conscience que parmi nous, la
première personne que nous mettrons en avant sera autant diabolisé
par le système. Il ne s'agit pas non plus de remettre en cause la
stratégie qui a permis de rassembler 7 millions d'électeurs. Au
contraire, il s'agirait d'y retourner franchement : rassembler
le peuple autour d'un programme enthousiasmant, à la hauteur des
enjeux de notre temps, plutôt que de réunir les organisations
politiques qui sont responsables de la désillusion collective quant
au mot « Gauche ».
Mais si on décide de présenter un-e
autre candidat-e aux élections présidentielles, nous risquons de
passer des mois et des mois à nous écharper pour telle ou telle
figure. Pire encore, ce ne seront pas forcément les personnalités
qui correspondent le mieux à nos attentes communes qui émergeront
d'un tel processus conflictuel. Nous avons plus de chance de laisser
ainsi émerger des personnes qui ont une haute idée d'elles mêmes,
et surtout qui sont persuadées d'être les seules capables d'être
candidates. Elles seront soutenues par des réseaux de militants qui
penseront aussi que seul « leur.e candidat.e » peut
représenter la FI et l'AEC. Si ce n'est pas lui-elle qui est
finalement désigné-e, il en restera pour longtemps de la rancoeur
qui pourrira la campagne elle-même et ses suites. Enfin un tel
processus sélectionnera de fait des personnes qui auront
l'intelligence d'intriguer pour se faire désigner, et pour
décrédibiliser discrétement leurs concurrents. Pas des
personnalités dont le moteur essentiel est d'être au service de la
cause, car elles préféreront se mettre en retrait plutôt que
d'approfondir les conflits autour d'elles. Or c'est, à mon avis, ce
dernier profil dont nous avons le plus besoin.
C'est pourquoi je propose un processus
de désignation qui désamorce les manœuvres pour rendre
incountournable une peronnalité, mais qui recentre le travail de
désignation sur des questions politiques : quel-le candidat-e
ayant les meilleures compétences pour quelles tâches politiques ?
Explications détaillées pour
chaque étape :
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Étape 1 : définir collectivement une « fiche de poste » à contenu politique.
Il s'agit de se poser la question au
sein de la France Insoumise : qui voulons-nous présenter à nos
concitoyens comme le-a président-e de la République qui convoquera
l'Assemblée constituante, et qui appliquera les premières mesures
prioritaires de l'Avenir en Commun ? En présentant une personne
pour une telle mission, nous prenons une énorme responsabilité
collective. Il est donc absolument dérisoire de perdre du temps à
discuter tel ou tel aspect de la personnalité d'un tel. Il s'agit de
définir ensemble a priori quelles sont les compétences nécessaires.
Parmi les éléments à prendre en
compte, le fait que le président de la République disposera de
l'arme nucléaire est majeur pour définir ce qu'on attend de nos
candidats potentiels. Ensuite, il faut aussi prendre en compte qu'une
France présidée par un-e insoumis-e sera confrontée à une
hostilité internationale énorme. Il s'agit donc de choisir
quelqu'un qui à la fois a une bonne connaissance des enjeux
géopolitiques, et qui a un caractère suffisamment trempé pour ne
pas fléchir ou paniquer au moment des décisions cruciales à
prendre.
Enfin, troisième enjeu à prendre en
compte, la quasi-irresponsabilité institutionnelle du ou de la
Président.e dans la 5° République. Il s'agit donc de présenter
des personnes en qui nous pouvons avoir confiance pour appliquer le
programme sur lequel il.elle.s se sont engagé.es, à commencer par
convoquer une assemblée constituante.
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étape 2 : sélectionner entre 5 et 8 personnes qui correspondent à cette fiche de poste
Cette tâche pourrait être confiée au
comité électoral de la France Insoumise. Il pourrait procéder
comme il l'a fait pour les Européennes : recueillir des
candidatures à la candidature émises parmi les insoumis ;
pré-sélectionner un certain nombre d'entre elles qui semblent
correspondre à la fiche de poste ; interviewer les candidat.es
pré-sélectionné.es et n'en retenir qu'entre 5 et 8, à parité. Il
n'aurait pas à ordonnancer.
On pourrait exiger des candidats à la
candidature qu'ils.elles s'engagent à faire campagne pour la.le
candidat.e finallement choisi même s'ils ne sont pas retenus.
Comme pour la constitution de la liste
pour les Européennes, une première publication du groupe de
candidats potentiels pourrait être faite, afin que chaque insoumis
puisse s'exprimer pour indiquer si telle ou telle personne manque
manifestement au groupe, ou bien si tel.le ou tel.le candidat.e
potentiel.e présente des incompatibiltés majeures par rapport à la
fiche de poste.
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étape 3 : faire valider par vote le groupe de candidats potentiels
Une fois le groupe de candidat.es
potentiel.les relu et critiqué par l'ensemble des insoumis.es, un
vote des insoumis.es validera que la majorité dans le mouvement est
d'accord pour considérer que n'importe lequel-laquelle des
candidat-es potentiel-les mérite de représenter la France
Insoumise, son programme et sa stratégie aux élections
présidentielles.
Chaque candidat-e potentiel-le s'engage
également à faire campagne quelque soit le résultat du tirage au
sort.
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étape 4 : tirer au sort parmi les candidats potentiels qui sera effectivement candidat à la présidentielle
Le tirage au sort parmi les candidat-e
potentiel-le permet d'éviter que le choix parmi des personnes
d'égale qualité politique ne se fasse par le conflit, la
dépréciation de l'autre, l'identification d'une partie des insoumis
à tel.le ou tel.le…
Ce processus a donc comme premier
objectif d'éviter non seulement les conflits stérils dans la
désignation du ou de la candidat.e, mais surtout de faire en sorte
que le choix du ou de la candidat.e repose uniquement sur des
critères politiques.
Il me semble que ce processus aurait
des effets vertueux à plusieurs titres. De manière générale,
qu'il participerait à une maturation de la conscience politique en
France. Or une telle maturité est ce dont nous avons le plus besoin
pour envisager une 6° République.
Du point de vue des candidats à la
candidature, ce processus obligera à s'y projeter non pas en pensant
être la personne providentielle, comme si quelqu'un pouvait être
prédestiné à un tel rôle, mais en considérant que cette
candidature fait partie du service rendu au mouvement, comme toute
autre tâche militante. Chacun choisissant et se voyant confier une
tâche selon sa disponibilité, ses compétences et la reconnaissance
du collectif, être candidat releverait de la même logique :
est-on disponible, compétent et reconnu pour pouvoir être candidat.
S'il y en a qu'un-e, ce sera celui-celle-là. S'il y en a plusieurs,
ce sera l'un-e d'entre eux-elles. Chacun est évidemment différent,
mais chacun peut tout aussi bien remplir le rôle.
Du point de vue des militants actifs de
la France Insoumise, il s'agit de cesser définitivement de faire de
la politique comme s'il s'agissait d'une compétition entre
fans-clubs. L'enjeu n'est pas quelle personne sera candidate.
Personne ne sera jamais parfait en tout point, mais en même temps
nous avons besoin de personnes pour incarner nos idées. L'enjeu,
c'est le projet politique que nous défendons. Il est évidemment
nécessaire que les personnes que nous mettons en avant ne
contredisent pas ce projet. Mais nous avons parmie nous suffisamment
de personnes dévouées et compétentes dont la vie et les luttes
sont en profonde cohérence avec notre projet.
Auprès de nos concitoyens à qui nous
présenterions dans un premier temps un groupe de candidats
potentiels, dont chacun-e est là pour le projet politique, dont
chacun-e est prêt-e à faire la campagne d'un-e des autres avec la
même intensité que s'il-elle était lui-elle-même tiré-e au sort,
une telle démarche éléverait fortement le niveau de crédibilité
de notre mouvement. Nous ne serions définitivement plus « comme
les autres ». Nous obligerions nos concitoyens à considérer
ces candidats potentiels en fonction de leur point commun :
notre projet politique, plutôt qu'en fonction de leurs inévitables
imperfections individuelles.
Face au système médiatique enfin, qui
n'aura de cesse de discréditer notre prochain candidat et qui n'a
jamais rendu compte de la nouveauté politique que représente la
France Insoumise, cela permettra à la fois de rendre vaine toutes
les manœuvres de diabolisation. D'autant plus si le groupe de
candidat-e potentiel-le réunit des personnalités superficiellement
très variées, et par le fait que chacun fait confiance aux autres
pour être candidat à sa place, tout pinaillage sur un trait de
caractère de l'un-e ou de l'autre sera juste ridicule. Cela rendra
aussi manifeste, incontournable la nouveauté des pratiques
politiques de la France Insoumise.
Voici la proposition, argumentée.
Merci de laisser des commentaires pour améliorer, ou critiquer
l'idée.
Philippe Gastrein
Cahors, 3 juin 2019